On extended, boundless, vibratory and in-the-now sympathy music
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!!Notes {br}{br} ---- — "A la fin de 1971, j'ai composé ''Clapping Music'' en cherchant à créer une pièce de musique qui ne ferait appel à aucun instrument hormis le corps humain. Initialement je pensais faire une pièce avec une phrase, mais cela me sembla plutôt hors de propos car cela introduisait une difficulté dans le processus musical (le phrasé) qui ne s'adaptait pas à un moyen de production sonore si élémentaire. La solution fut de prendre un exécutant qui produirait, immuablement, le même dessin rythmique d'un bout à l'autre, tandis que le second décalerait d'un coup, après un nombre donné de reprises, s'éloignant de l'unisson en jouant avec une battue d'avance, et ainsi de suite jusqu'à rejoindre finalement le premier joueur à l'unisson. La différence principale entre ces changements subits et les changements progressifs des phrases dans d'autres pièces, c'est qu'avec une phrase l'on peut entendre le dessin s'éloigner de son double en écoutant les temps forts prendre de la distance, tandis qu'avec des changements brusques de ''Clapping Music'' on a l'impression d'une série de variations de deux dessins différents dont les temps forts coïncideraient. Dans ''Clapping Music'' il peut être assez difficile d'entendre qu'en fait le deuxième exécutant joue toujours le même dessin initial que le premier exécutant, en commençant à un autre moment." — (Steve Reich, Écrits et entretiens sur la musique, (traduit de l'américain par Bérénice Reynaud), Christian Bourgeois 1981) {br}{br} ---- ''Clapping Music'' consiste en une unique mesure de 12/8 dans laquelle s'inscrivent huit claquements de mains (3+2+1+2), à donner par deux claqueurs (ou deux groupes de claqueurs) en boucle. Il s'agit donc d'une cellule rythmique de 12 croches. Cette cellule est répétée à l'identique par un des deux participants pendant toute la pièce. Le deuxième exécutant joue au départ cette même cellule à l'unisson, et la répète 8 ou 12 fois. Dans ce canon, il faut décaler l'une des parties d'une note (d'une croche vers la gauche), ce qui produit un déphasage avec la première voix, après un nombre de tours défini à l'avance entre les deux claqueurs-interprètes, et ce sur douze girations puisque la mesure compte douze temps, donc douze décalages possibles avant de retomber sur ses pieds. Après 12 déphasages, le rephasage naturel s'opère et la pièce est terminée. La pièce dure environ 4 minutes.{br}Chaque décalage d'une croche donne l'impression de créer de nouvelles structures, grâce à la construction ambigüe de la cellule rythmique en 12/8, qui place en particulier des notes sur les cinquième, huitième et dixième temps2. L'auditeur peut alors entendre différents motifs se former, et même ne pas se rendre compte que l'un des exécutants joue toujours la même chose, malgré la simplicité apparente de la construction de la pièce.{br}Dans un rapport mathématique, chaque nouvelle mesure est une translation horizontale du motif d'origine, par glissement de phase. Si f(x) représente le motif premier, le second claqueur joue f (x + 1) dans la mesure qui suit, f (x + 2) dans la suivante, etc. Dans la dernière mesure, nous avons f(x + 12) = f(x), ainsi le second claqueur sera revenu au motif de départ. Ceci correspond au principe de périodicité.{br}Il y a 105 motifs rythmiques possible qui contiennent 4 pauses non consécutives et 8 claps. Parmi ces motifs, le motif pris par Steve Reich (3+2+1+2) est l’une des deux seules possibilités qui donnent 12 mesures distinctes et un nombre non-répété de claps (par ex. 5+1+1+1). Le motif syncopé choisi par Reich est particulièrement unique.{br}{br}On sait que ce dessin rythmique, à un clap près, appartient à la tradition musicale populaire Yoruba d'Afrique de l'Ouest - ce dont Reich ne se cache d'ailleurs pas, puisqu'il a étudié ce répertoire de près lors d'un voyage d'exploration musicale au Ghana, ce qui donnera naissance à ''Drumming'' une œuvre datant de 1971 — (À l’été 1970, Steve Reich étudie la percussion africaine avec le mâitre Gideon Alorwoyie au Ghana (à Accra), et y retourna à l'automne 1971, puis en 1973 et 1974, le compositeur s’initie au gamelan balinais qui influencera ''Six Pianos'' et ''Music for Mallet Instruments, Voices and Organ'', œuvres créées à la John Weber Gallery, New York, le 16 Mai 1973).{br} L'apport principal de Steve Reich est ce singulier jeu de décalage dont il faut remarquer que les douze "tours" offrent chacun un éclairage radicalement différent du dessin rythmique.{br}Ce n'est pas la seule fois que Reich fait appel à ce rythme spécifique : on le retrouve dans le magique ''[Music for 18 Musicians|https://youtu.be/ZXJWO2FQ16c?t=4m45s]'' écrit quelques années plus tard, et là, le dessin rythmique est teinté de cellules mélodiques qui le rendrent bien plus perceptible - ^[[à la cinquième minute à peu près de Music for 18 Musicians|https://youtu.be/ZXJWO2FQ16c?t=4m45s]^] - et qui permettent, en effet, de déceler les glissements en question. {br}{br} ---- [../files/articles/reich/1972_clapping_matrix_500.jpg] [../files/articles/reich/1972_clapping_written_500.jpg]{br}{small}(Matrice Clapping Music - Daniele Vineis, in Spartito perso: giochi di animazione con le musiche del Novecento, 2006, p. 95 - Centro Studi Musicali E Sociali Maurizio Di Benedetto, Ed. FrancoAngeli, Milano){/small} {br}{br} ---- |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t |t ''Reich had spent the summer of 1970 in Ghana, taking daily lessons from master drummer Gideon Alorwoyie, and transcribing the patterns. He has claimed that this experience served as not so much a direct influence as an affirmation :{br} "—— It confirmed my intuition that acoustic instruments and voices could be used to produce music that was genuinely richer in sound than that produced with electronic instruments, as well as confirming my natural inclination towards percussion". — {small}(Steve Reich){/small}{br}{br}The year before his trip to Ghana, Reich wrote in his manifesto-like "Some Optimistic Predictions about the Future of Music" of May 1970 :{br}"—— Non-Western music in general and African, Indonesian and Indian music in particular will serve as new structural models for Western musicians. Not as new models of sound. (That's the old exoticism trip.) Those of us who love the sounds will hopefully just go and learn how to play these musics." — {small}(Steve Reich){/small}{br}{br}His experiences in Ghana were a crucial factor in Reich's creative development at the time, but ^[his music^] was never intended as some sort of Manhattan exoticism : Reich was always firm about this, declaring that he had no interest in sounding exotic. Reich returned from Ghana and the autumn of 1971 (his next composition ''Drumming'' was composed between the autumn of 1970 and premiered at MoMA on 3 December 1971).{br}Reich has noted that in 1970 : {br}"—— I was still thinking about ^[African musical influences on his own work^] and about non-Western civilization generally, and beginning to appreciate its importance. Undoubtedly it grew out of an interest in jazz and an interest in American black people. ... The interest in African music was very much a feeling (particularly with Coltrane in his late music) that American black culture was simply a European overlay on an African culture." — {small}(Steve Reich, In Talking Music, pp. 304-305){/small}'' — {small}^[[Source : Glendora Review: African Quarterly on the Arts - Vol. 03 No. 3&4 2004|http://pdfproc.lib.msu.edu/?file=/DMC/African%20Journals/pdfs/glendora%20review/vol3no3-4/graa003003-4022.pdf]^]{/small}|t |t |t |t |t |t |t |t |t {br}{br}Steve Reich a séjourné au Ghana à l’été 1970 prenant des leçons quotidiennes avec le maître tambour Gideon Alorwoyie et transcrivant les différents motifs joués. Il a affirmé que cette expérience a servi non pas en tant qu’influence directe sur son travail mais plutôt comme une confirmation : {br}"—— Cela a confirmé mon intuition qu’utiliser les instruments acoustiques et la voix dans la musique amenait véritablement beaucoup plus de richesse au son que d’utiliser des instruments électroniques, cela a confirmé aussi mon inclination naturelle vers la percussion." — {small}(Steve Reich){/small}{br}{br}Une année avant son voyage au Ghana, Steve Reich écrivit un texte pseudo-manifeste ''Quelques prédictions optimistes à propos de l’avenir de la musique'', en mai 1970 : {br}" —— La musique non-occidentale, et en particulier les musiques africaines, indonésiennes et indiennes, ouvriront et structureront nouveaux modèles pour les musiciens occidentaux. Pas comme de nouveaux modèles sonores (ça c’est de l’ordre d’un vieil exotisme éculé). Ceux d’entre nous qui aiment le son iront, nous l’espérons, apprendre comme jouer ces musiques." — {small}(Steve Reich){/small}{br}{br}Ses expériences au Ghana furent cruciales dans le développement artistique de Steve Reich, mais sa musique n’est jamais tombée dans une sorte de goût déplacé d’exotisme : Steve Reich l’a toujours affirmé, en déclarant qu’il n’avait aucune inclination à vouloir "sonner exotique". Il retourna au Ghana à l’automne 1971 (sa composition ''Drumming'' a été composée en automne 1970 et créée au MoMA le 3 décembre 1971).{br}Il nota ceci en 1970 :{br}" — — Je pensais toujours ^[aux influences de la musique africaine sur mon travail^] et de manière générale aux civilisations non-occidentales, et je commençais à apercevoir leur réelle importance. Cela a dû commencer certainement par mon intérêt au jazz et à la culture afro-américaine… Mon intérêt à la musique africaine était plus de l’ordre de l’impression (notamment avec les dernières musiques de John Coltrane) que la culture noire américaine était tout simplement une superposition européenne sur une culture africaine." — {small}(Steve Reich, In Talking Music, pp. 304-305){/small}'' — {small}^[[Source : Glendora Review: African Quarterly on the Arts - Vol. 03 No. 3&4 2004|http://pdfproc.lib.msu.edu/?file=/DMC/African%20Journals/pdfs/glendora%20review/vol3no3-4/graa003003-4022.pdf]^]{/small}| {br} {html} <iframe width="560" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/Fx7N8CXt0Fg?rel=0" frameborder="0" allowfullscreen></iframe> {/html} {html} <iframe width="420" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/PVDK8iqp38o?rel=0" frameborder="0" allowfullscreen></iframe> {/html} {br}{small}Yorùbá Bàtá Ensemble Drums{/small} {html} <iframe width="560" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/YZOg4xIiulw?rel=0" frameborder="0" allowfullscreen></iframe> {/html} {br}{small}Smithsonian Folkways, 1996, SF40440 - Part 1{/small} {html} <iframe width="560" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/_xInc13g4Ok?rel=0" frameborder="0" allowfullscreen></iframe> {/html} {br}{small}Smithsonian Folkways, 1996, SF40440 - Part 2{/small} {br}{br} {html} <iframe width="560" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/ZXJWO2FQ16c?rel=0&start=285" frameborder="0" allowfullscreen></iframe> {/html} {br}{br} [../files/articles/reich/1972_clapping_yoruba_800.jpg|../files/articles/reich/1972_clapping_yoruba.jpg] {br}{small}— (In Steve Reich, Writings on Music, 1965-2000, pp. 62-63){/small} ---- {br}{br} {br}{br} ----
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